Je viens de relire un très bel article de Bruno Gialini sur l’enseignement, paru en 2013, dans la défunte revue Nouvelles Clés. Il évoque avec passion et précision les manières dont il a pu renouveler sa manière d’exercer son métier de professeur de philosophie en lycée et à l’université.
Il a transformé ses approches pédagogiques et innové fortement :
- en prenant notamment en compte le corps et les émotions de ses étudiants, ainsi que que les siennes, en situation, dans le moment donné
- pour créer une dynamique vivante d’échanges, où ce qui est visé, c’est une certaine qualité de pertinence : par rapport à l’intention de l’enseignant, l’état de réceptivité des élèves, les problèmes du moment, ici et maintenant, dans le groupe…
- Et ce, en refusant une conception de l’enseignement qui domine encore : le modèle erroné du transfert entre deux vases, l’un, celui du sachant, empli de connaissances et l’autre, vide, en attente de réception, de l’élève !
Sa nouvelle posture et ses propositions de changement sont difficiles à accepter car elles remettent en cause notre propre tradition culturelle : nous avons été élevés en grand partie dans cette approche des vases communicants, dont le succès est évalué avec la mesure d’un niveau, celui du volume d’eau passé dans le récipient initialement pensé comme vide.
Or il est très difficile de désapprendre et de sortir des habitudes et des stratégies de succès passées.
Le premier pas essentiel, c’est que l’enseignant lui-même comprenne qu’il transmet non pas tant un savoir donné que son propre rapport au savoir, la manière dont il vit et éprouve sa connaissance.
Les étudiants, jeunes ou adultes, sont extrêmement sensibles, consciemment ou non, à la manière dont l’enseignant vit ce qu’il souhaite transmettre. Et c’est cela qui peut entrer, à un moment donné, en résonance avec leur propre désir d’apprendre.
La vraie question devient alors : Quelle est la couleur de mon enseignement ?
Et elle se diffracte en sous-questions : Qu’est ce que je ressens dans cet acte de transmission ? Qu’est ce que je m’efforce de transmettre et avec quel type de présence ?
Le premier indicateur de réussite, c’est alors, non pas le feedback de l’extérieur (les évaluations de toute sorte à venir…), mais avant toute chose la joie même que j’éprouve dans cet acte de présence vivante et inspirée où je fais passer les messages que je considère comme importants.
Le reste suivra …
Lisez le bel article de Bruno Gialini ici !