Dirigeant, pourquoi souhaiter « mieux se connaître » ?

Pourquoi conseiller à un manager, à un chef d’entreprise de prendre le temps de mieux se connaître ?

Dans un monde où vitesse de décision et passage à l’action sont considérés comme des qualités essentielles, le fait de s’attarder sur soi peut apparaître comme contre-productif (perte de temps) voire même susciter des craintes (s’apitoyer sur soi, se regarder le nombril, plonger dans la maelström sans fin de ses émotions).

Voici deux éléments pour comprendre le contexte de cette interrogation.

1) L’univers de référence des managers s’est transformé en un monde imprévisible : non plus incertain, mais radicalement déconcertant.

Le contexte de la prise de décision et de l’action est devenu instable. Les surprises se multiplient et de ce fait le manager ne peut plus s’appuyer sur un référentiel externe solide et stable. Les usages clients, les ruptures technologiques, les changements de législation… ne cessent désormais de se modifier de manière accélérée, sans que l’on puisse arrêter une photographie stable pour prendre ses repères.

Nous évoluons désormais dans un environnement dit VUCA, c’est-à-dire un univers qui échappe à la modélisation, à l’anticipation. Le manager doit devenir agile car il ne peut plus s’en remettre à sa seule faculté d’anticiper. Anticiper impliquait de pouvoir «prendre les devants» – c’est le sens étymologique du mot ! – mais la réalité managériale est devenue évanescente, insaisissable.

Un tel univers est fortement « déconcertant ». Le terme est très éclairant. Il possède deux significations distinctes et liées.

« Déconcerter », c’est d’abord « troubler les plans de quelqu’un ». Remettre en cause l’échafaudage mental que l’on s’était construit pour se préparer à agir. En ce sens, un contexte déconcertant rend caduques les stratégies élaborées pour structurer une action projetée. Mais « déconcerter », c’est aussi « faire perdre contenance à quelqu’un ».

Le manager qui voit ses plans remis en cause par un changement inattendu de contexte perd l’équilibre, se sent vulnérable, et soudainement désorienté. Il a perdu ses appuis. Comment peut-il les retrouver ?

2) Deuxième élément extrêmement déstabilisant pour les chefs d’entreprise, la manière de diriger a changé : les hommes et les femmes du 21ème siècle acceptent de moins en moins le style directif des patrons autocrates, de ceux qui s’appuient sur leur position de chef pour tenter d’imposer leurs vues. L’autorité efficace aujourd’hui ne s’exprime plus par une approche top-down, ponctuée d’ordres et de menaces. Un mode de management fondé sur la seule contrainte et le contrôle possède une efficacité très limitée.

Pourquoi ? Par ce que l’autoritarisme et sa règle du «on ne discute pas, c’est comme ça» ne permettent pas de construire l’unité et la cohérence des équipes nécessaires pour faire face de manière créatrice à l’imprévu.

Le dirigeant ne peut plus prétendre savoir seul ce qu’il faut faire dans l’univers VUCA ;  il doit donc se reposer sur l’intelligence de ses collaborateurs ou se priver de précieuses ressources. La question se pose alors de la légitimité du « chef », avec une équation redoutable : si le règne de l‘expertise se réduit à cause de la complexité environnante qui défie les pronostics, sur quoi le manager va-t-il pouvoir s’appuyer pour mobiliser ses troupes, pour leur inspirer confiance et les entraîner dans l’action collective ?

Résumons-nous : dans le monde d’aujourd’hui, la principale difficulté pour le manager, c’est de retrouver des éléments de stabilité, c’est de s’assurer d’un sol ferme pour pouvoir prendre ses appuis, et trouver ses repères.

En tant que dirigeant, responsable d’un collectif d’action, j’ai donc intérêt à approfondir la connaissance de moi-même pour viser les trois résultats suivants :

  • Identifier mes points d’appuis intérieurs, les éléments positifs structurants que je possède en moi et qui fondent la confiance en moi-même ;
  • Prendre conscience de mes points de vigilance comportementale pour améliorer mes capacités relationnelles ;
  • Reconnaitre mes sources intérieures d’inspiration, vectrices d’énergie et de motivation.

Dans un prochain billet, j’esquisserai quelques pistes pour entrer concrètement dans une démarche de découverte de soi utile pour le dirigeant… et ses équipes.

Olivier Basso, Directeur du Certificat « Leadership et Management Complexe »  (Sciences Po Executives)

Pourquoi un nouveau type de leadership est-il en train d’émerger ?

Nous sommes arrivés à la fin de plusieurs mondes.

C’est la fin d’un univers d’action prédictible : le VUCA, complexe déroutant, qui échappe à la prise, ouvre à la multiplicité des surprises incessantes : l’inconnu a remplacé l’incertitude.

Le leader ne peut plus être un expert omniscient, il doit aller de l’avant en évoluant avec une large part d’inconnu, irréductible. Les ruptures stratégiques peuvent se produire dans différents ordres – technologique, social, politique… parfois simultanément.

Dernier exemple en date qui a retenu mon attention, et qui concerne l’univers tout entier d’un géant tel qu’EDF  : Total et … Carrefour vont bientôt vendre de l’électricité de manière très compétitive car le marché européen de l’électricité leur permet désormais d’avoir accès à de l’électricité à un tarif qui est inférieur au coût de production du nucléaire français ! Le patron du géant pétrolier Total, Patrick Pouyanné, réfléchit à vendre directement du gaz et de l’électricité aux particuliers sous la marque du groupe.

C’est aussi la fin d’un certain idéal de perfection : il faut avancer par esquisses successives, par prototypage car le contexte demande une capacité d’ajustement constant : vouloir réussir du premier coup, sacrifier au culte de la perfection, n’a plus beaucoup de sens car, dans l’intervalle de la réalisation, les paramètres auront probablement évolué… Le manager expert risque plus que jamais d’être victime du syndrome d’analysis/paralysis.

C’est également la disparition du modèle traditionnel d’autorité : fin du commandement en mode top-down qui impose et répartit le travail en prenant appui sur la position hiérarchique. Le leader doit devenir inspirant pour mobiliser ses équipes et insuffler du sens collectif et individuel dans les projets à mener à bien, tout en ayant à « se débrouiller» avec les clients, la hiérarchie et les incohérences de l’organisation.

C’est également la fin (depuis quelque temps déjà !) de l’organisation stable : chaos intérieur des réorganisations, restructuration sans fin, effet de shaker incessant avec une logique projet tous azimuts qui déplace sans cesse les lignes de l’organisation, et une stratégie corporate souvent introuvable car continuellement réactualisée au gré des surprises (technologique, concurrentielle…). La vague digitale rebat les cartes et aplatit les hiérarchies…

Dans une telle configuration, le risque est grand pour l’organisation et le manager de se replier sur soi-même, de se rigidifier sous l’effet du stress et de se réfugier dans la prolifération des procédures destinées à assurer la maitrise des risques…

Alors même que ce qui est désormais demandé aux organisations et à leurs employés, c’est de faire preuve de créativité et d’agilité adaptative.

Alors même que les salariés – jeunes et moins jeunes ! – demandent de plus en plus d’autonomie créatrice, et de création de sens dans ce qu’ils font.

Face à ces demandes pressantes, que peut faire le manager en quête d’inspiration et de renouveau ?

Pour commencer, lire l’article suivant…

Olivier Basso (directeur scientifique du Certificat Leadership et Management Complexe, Sciences Po Executives – 12 jours sur 6 mois pour répondre aux défis du management complexe)

Leadership : qui définit les marges de progrès des dirigeants ?

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Et si c’était le DRH avec ses équipes qui tenait les clefs du développement en leadership des dirigeants de son groupe ?

En d’autres termes, et si le niveau de développement en leadership des dirigeants d’un Groupe donné dépendait fortement de celui de son Directeur des Ressources Humaines ?

La manière de diriger du DRH et de ses adjoints avec leurs caractéristiques propres  (degré de dynamisme entrepreneurial, conception de la performance, goût de la coopération, sensibilité au risque…) créent le contexte de référence et les filtres qui vont  se diffracter dans la construction des programmes de formation, le design des dispositifs de développement, et la sélection des prestataires intervenants.

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En d’autres termes, l’évaluation de ce qu’il est possible de faire, de ce que les dirigeants ou les hauts potentiels sont susceptibles d’accepter en terme de défis, de niveau d’inconfort, d’expérimentation se fera donc souvent à l’aune du niveau de leadership des acteurs RH impliqués dans ces choix.

De ce fait, les dirigeants vont expérimenter des dispositifs de développement qui in fine correspondront au niveau de leadership de ceux qui ont préparé lesdits programmes.

L’enjeu est considérable pour les entreprises : le développement du leadership des DRH et de leurs adjoints conditionne probablement le développement du leadership de leurs dirigeants.

 

 

 

Leadership, voix et ressources : à découvrir le jeudi 23 février 2017 de 9h à 10h

INVITATION

Le Réseau Faubourg a le plaisir de vous convier autour d’un petit-déjeuner débat sur le thème :

LEADERSHIP, VOIX ET RESSOURCES
Du souffle à l’inspiration

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L’animation de ce petit-déjeuner sera assurée par Olivier Basso, professeur associé au CNAM, expert-facilitateur en Leadership, et Louise Vertigo, chanteuse et facilitatrice en Voix et Souffle.

Cette conférence sera suivie d’un temps de partage et d’échange avec le public.

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Quel leadership dans un monde incertain ?  

Trouvez vos appuis et vos ressources intérieures :

  • L’intention, la posture.
  • Le souffle et la voix.

Quand ?

Jeudi 23 février 2017
9h/10h (accueil à partir de 8h30)

Où ? 

Private French University
35 rue de Courcelles,
75008 Paris
Métro Saint-Philippe du Roule /  Miromesnil

Nombre de places limitées !

Pour vous inscrire, cliquez ici

La comptabilité bénéfique: comment « compter ce qui compte » le plus ?

Il y a – et c’est heureux – aujourd’hui de nombreuses propositions pour re-fonder l’entreprise et la replacer dans sa dynamique de projet collectif inscrit dans une société qui l’accueille.

Mais à partir de ces approches humanistes, comment faire naitre de nouvelles réalités managériales? C’est souvent là où le bât blesse car on ne sait par où commencer, et l’on reste enfermé dans les représentations anciennes. think-out-of-the-labyrinth

Le concept de « comptabilité bénéfique« , imaginé par Patrick Viveret, permet à chaque manager de rentrer directement dans le vif du sujet.

Il s’agit d’organiser des ateliers collectifs et de répondre successivement à deux questions clefs :

  1. Qu’est ce qui compte le plus pour vous dans l’entreprise ?
  2. Comment « compter ce qui compte » le plus ?

Alors êtes-vous prêt à entrer dans cette démarche concrète afin de définir, partager et  tenir compte de ce qui compte le plus pour vous et votre équipe 

Formation des leaders, éducation des citoyens: l’essentiel déjà là

Etoile soleil - education

Depuis maintenant de très nombreuses années, les débats sur le système éducatif en France laissent chacun d’entre nous dans une prison d’interrogations inextricables et un sentiment de faillite irrémédiable.

Au dessus de la mêlée, un petit film, dense et précis, montre la voie du renouveau.

Il montre ce qui existe déjà, et propose ainsi une source d’inspiration pour tous ceux qui aspirent à créer une autre forme d’éducation.

Sont présentés ici les éléments d’un enseignement de maternelle qui résonne avec force  avec… la formation de nos futurs leaders dans l’entreprise et la société.

Ils sont éduqués pour devenir : 

Créatifs,
Conscients des enjeux sociétaux,
Confiants dans leur capacité à faire bouger les lignes,
Capables de révéler leur plein potentiel,
en s’acCordant avec les autres

pour agir en communauté apprenante, solidaire et vivante.

 

Pour aller plus  loin, venez  à la soirée du 24 juin 2015 et faites connaitre ce film.

Il est temps de donner  voix et place aux réponses du monde nouveau qui est déjà là !

 

Que peuvent apporter les sciences de gestion au politique ?

Couverture Basso et Very - RFG_245_L204Que peuvent apporter les sciences de gestion aux décideurs politiques ?

Si comme nous en avertit Montaigne, « le monde n’est qu’une branloire pérenne » (Les Essais, III, 2), force est de reconnaître que le 21ème siècle commençant nous plonge dans une société en métamorphose où il devient de plus en plus difficile de distinguer ce qui relève du politique ou du gestionnaire.

L’entreprise peut elle-même être considérée comme un acteur politique contribuant à dessiner les évolutions sociétales. Dirigeants d’entreprise et hommes politiques s’efforcent, séparément ou de façon conjointe, de façonner un monde de l’action collective parfois perçu comme volatile, ambigu, incertain, complexe, ou encore équivoque.

L’enchevêtrement des problématiques managériales et politiques est également renforcé avec l’évolution des technologies numériques :

  • ainsi, aux promesses de l’économie collaborative font échos les menaces potentielles du Big Data et de la connectivité (écoutes de la NSA) ;
  • la multiplication des objets intelligents accroît les opportunités d’achat et de mise en contact mais enserre aussi le consommateur citoyen dans des interactions non nécessairement désirées ;
  • la dynamique des communautés numériques interpelle le marketing des réseaux sociaux et renouvelle également les modalités d’action politique (Wikileaks, Anonymous, mouvements des Printemps arabes).

Pour en savoir plus, découvrez le numéro spécial de la Revue Française de Gestion avec Olivier Basso (CNAM) et Philippe Véry (EDHEC) comme rédacteurs invités  !

Protéger la Grande Entreprise contre les fonds activistes…

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Les fonds activistes détiennent plus de 115 milliards de dollars d’actifs, soit trois fois plus qu’il y a cinq ans. Cette puissance financière leur permet d’attaquer des entreprises à forte capitalisation,.

« C’est le cas de DuPont qui, malgré une valorisation de 67 milliards de dollars et des résultats solides, se voit imposer des leçons de management par Nelson Peltz. « Les outils qu’on utilisait pour punir les mauvais gestionnaires sont employés pour déstabiliser les bons », regrette Jeffrey Sonnenfeld, un professeur de Yale considéré comme l’un des grands experts du sujet aux Etats-Unis. « Les activistes s’attaquent à ce qu’il y a de mieux aux Etats-Unis. Pepsico et DuPont sont des entreprises parfaitement gérées », abonde Bill George, professeur à Harvard et par ailleurs ancien PDG de Medtronics. » (Source: Les Echos).

L’argument avancé est toujours le même : le groupe, ensemble de métiers plus ou moins liés,  détruit de la valeur et il ne permet pas aux activités à forte croissance de dégager leur plein potentiel… ce raisonnement de rendement réduit l’entreprise à un simple véhicule d’investissement dont les morceaux se démembrent. Il nie radicalement l’essence même de l’entreprise, qui est une communauté d’investisseurs, de producteurs et de dirigeants, unis par un projet commun.

Il est grand temps que les Grandes Entreprises organisent la défense de l’intérêt … de l’entreprise !

Olivier Basso

Ce que cache vraiment le « golden hello » de Sanofi…

Sanofi golden hello

Les 4 millions d’euros accordés au futur patron de Sanofi avant même d’avoir commencé à travailler pour son futur employeur cache une question essentielle :

Comment se fait-il qu’un groupe industriel qui compte 110 000 personnes dans le monde et qui a dégagé  6,68 milliards d’euros de résultat net en 2013 , ait été incapable d’identifier en son sein les noms de trois ou quatre prétendants possibles pour la direction générale ?

Sanofi est-elle devenue une compagnie sans âme, privée de talents et employant à tout niveau des exécutants incapables de progresser et de développer des qualités de leaders? N’y avait-il personne, dans le premier, le deuxième voire le troisième cercle de dirigeants pour pouvoir prendre la suite ?

L’exemple de Thalès avec le choix à sa tête en 1998 de Denis Ranque, à 46 ans, issu à l’époque du 3ème cercle de l’entreprise, est-il voué à n’être qu’une éclatante exception ?

Le choix d’un mandataire social venant d’une société extérieure au groupe interroge fortement la capacité de Sanofi à  identifier les potentiels, les futurs leaders,  à les élever en son sein, à les faire croitre…

Certes l’épisode Le Fur a marqué l’échec du choix d’un successeur en interne en 2007, mais faut-il s’arrêter à un exemple dans une industrie où le succès nait de nombreuses expérimentations (trials and errors).

Le risque majeur qu’encourt Sanofi, c’est d’être entrée dans un cycle de dénaturation managériale où chaque nouveau leader, étant issu de l’extérieur, apporte des éléments étrangers au code culturel fondamental du groupe,  introduit, à des niveaux hiérarchiques élevés, des personnalités éloignées de la dynamique culturelle de l’entreprise et de sa capacité historique à se développer et à s’adapter.

L’avenir nous dira si Sanofi peut retrouver le souffle entrepreneurial de… Sanofi ou si elle s’achemine lentement mais sûrement vers une disparition programmée : le mécanisme en est bien connu, avec une financiarisation accrue, une mise en process systématique, un accent mis sur la compétitivité par les coûts, et in fine l’affaiblissement du ressort vital… Affaire à suivre.

Olivier Basso